F3000

Négociant ses derniers virages au Grand Prix de Pau de 1998, la F3000 tire des courbes que seule pourra reproduire la main de Dauguet. Il en émane la fierté et le danger qui constituent pour le peintre la beauté de la vie, et lui inspirent un projet d’affiche pour le prochain Grand Prix. Ainsi, la voiture ne quitte la compétition que pour en rejoindre une autre : celle du pastel et du fusain, de la vitesse et du frottement, du corps que l’on arrache à l’inertie. Une compétition artistique, aussi, où chaque croquis est un coureur, et Dauguet leur unique pilote.

A la manière de la force du taureau, ou de la fougue du cheval, la vitesse de la F3000 représente un défi pour l’homme, et permet au peintre de saisir l’indomptable. Les traits rugissent de toute leur provocante épaisseur noire, la couleur semble en glisser, la lumière traîne derrière. Le tracé lui-même est aussi imprévisible qu’il est audacieux : à l’immuabilité du goudron se substitut celle de la feuille, et l’on est tenu en haleine à chaque instant, ne sachant pas du bolide ou du crayon, lequel déraperait le premier. Dauguet peint l’adrénaline. Plus encore : il la crée. Il donne à contempler l’évasif, et la F3000 s’esquisse sur le croquis comme elle s’en esquive.

Tiraillée entre la figuration et l’abstraction, c’est la force de suggestion qui jaillit du dessin de Dauguet. C’est elle qui brise les lois de la nature : elle insuffle le mouvement et fige l’accélération du véhicule tout en même temps. C’est elle aussi qui donne à voir le peintre lorsqu’on regarde la peinture, et l’énergie du bras quand on observe le trait. Ce sont les vides entre les lignes, laissés à l’imagination du spectateur, qui ébauchent parallèlement l’intemporalité d’une voiture, et l’immortalité d’un artiste.

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